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La Data pour mesurer l’impact du numérique sur l’environnement

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  1. Les fondements de ces chiffres
  2. La prise de recul nécessaire
  3. Et côté données et puissance de calcul ?
  4. Comment mettre en œuvre cette évaluation
  5. Puis comment passer de l’évaluation à la mesure ?

L’impact humain sur l’environnement devient de plus en plus perceptible

Et toutes les activités humaines sont concernées, le numérique y compris ! Afin d’étayer ce constat, de nombreuses études ont été menées pour calculer l’empreinte écologique de ce secteur en particulier au niveau mondial. Cette démarche est louable et légitime car pour avoir une image la plus détaillée possible de la situation : il est important de se baser sur des éléments mesurables. En tant que spécialiste de la Data, je ne peux que valider cette démarche qui est essentielle pour (1) dresser un constat objectif, (2) définir des actions que l’on peut entreprendre et leurs portées, puis (3) identifier nos priorités pour optimiser l’impact de  nos efforts.

Certaines études sont allées assez loin dans cette mesure d’impact. Comme nous ne pouvons pas citer toutes celles qui ont été publiées, je me permets de vous conseiller les 2 suivantes :

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Les fondements de ces chiffres

Les chiffres qui ressortent de ces rapports sont impressionnants et révèlent les impacts qui, en ce qui me concerne, étaient insoupçonnés ou occultés. En effet, afin de dresser le bilan écologique du secteur numérique il est important de prendre en compte la construction du matériel, son utilisation mais aussi sa fin de vie. C’est pourquoi de nombreux indicateurs contribuent à la mesure de cette empreinte :

  • Quantité d’énergie et d’eau nécessaire à la production et au fonctionnement des équipements,
  • Association du mixte énergétique du pays au bilan carbone des équipements utilisés,
  • Quantité de matériaux nécessaires et impact environnemental et social sur les lieux d’extraction,
  • Impact environnemental pour la gestion de la fin de vie des équipements,
  • Consommation des réseaux des télécommunications, …

A ce jour, nous commençons à entendre des détracteurs qui remettent en cause les chiffres publiés ou souhaitent les minimiser. Pourquoi ? Comment ? Avec quels arguments.

Nous vous proposons de le découvrir dans cet article !

La différence entre évaluation et mesure

Une mesure est une détermination précise qui se base sur une unité ou un référentiel comme le mètre pour les dimensions. A ce jour, nous ne disposons pas de compteur qui permettrait de mesurer la quantité de carbone produite lors de l’envoi d’un mail, de la quantité d’électricité nécessaire au visionnage d’une minute de vidéo en streaming ou à la lecture de cet article. Nous ne disposons pas non plus d’un compteur qui permettrait de faire le bilan énergétique de ces mêmes équipements en cours de leur vie.

Imaginez un tel système qui viendrait déterminer de façon précise la quantité d’électricité liée au chargement de votre smartphone dans le détail de votre facture mensuelle, la part de vos usages sur les serveurs et l’ensemble des équipements nécessaires au visionnage d’une vidéo … Et si on transpose cet exemple à l’échelle mondiale, Statista estime qu’il y aurait actuellement 51 milliards d’objets connectés dans le monde donc l’addition va être longue …

Quand nous ne disposons pas de mesure précise à un instant T, il est toujours intéressant d’observer l’évolution de certains paramètres car c’est souvent plus facile à appréhender. On peut également réaliser une par comparaison entre une valeur observée et un standard connu. On parle alors d’évaluation.

Prenons un peu de recul pour démarrer cette évaluation

Sur les 40 dernières années : le début de l’ère du tout digital

Les sociétés ont progressivement basculé l’ensemble de leur fonctionnement sur des systèmes informatiques en suivant le rythme de la Transformation Digitale. Elles ont ainsi pu automatiser une grande partie de leur activité – si ce n’est pas la totalité – pour sortir du « tout » papier et aller vers le numérique. Le dernier exemple que l’on peut citer est lié à la loi 2020-105 applicable depuis le 1er aout 2023 qui oblige – entre autres choses – les commerçants à ne plus imprimer systématiquement les tickets de caisse. Dans les alternatives possibles, vous pouvez alors demander l’envoi dématérialisé de ce ticket par mail ou SMS ce qui renforce la digitalisation jusque dans notre quotidien.

Sur les 30 dernières années : la multiplication des devices

En lien avec cette digitalisation, nous avons vu augmenter de façon exponentielle les équipements connectés. Cette accélération continue est liée notamment à 2 leviers complémentaires :

  • Le nombre de personnes connectées à internet : si on considère les chiffres fournis par l’Union internationale des télécommunications on peut observer que la population mondiale connectée passe de 23% en 2008 à 48% en 2018. En tenant compte de l’évolution de la population mondiale sur cette période, + 800 millions de personnes, c’est bien 2 milliards d’utilisateurs supplémentaires qui accèdent à internet en 10 ans.
  • Le nombre d’équipements par personne : chacun dispose d’un ou plusieurs équipements connectés à titre personnel voir professionnel : smartphone, smartwatch, tablette, ordinateur, box, assistant connecté, … L’internet des objets – IdO en français ou IoT en anglais – vient contribuer fortement à cette dynamique avec de nouveaux équipements générant de plus en plus de données et consommant de nouvelles ressources : thermostat, pluviomètre, détecteur de CO2, ampoule, …

On comprend ainsi pourquoi l’Agence internationale de l’énergie (AIE) estime que le stock du nombre d’objets connectés va plus que doubler de 2020 à 2030, passant de 20 milliards à environ 45 milliards. Le rapport de France Stratégie publiée en février 2022 revient d’ailleurs sur la dynamique associée à ces équipements en soulevant certaines questions liées à leur utilisation – cybersécurité, protection des données, … – et propose des recommandations auxquelles les dernières réglementations font écho : loi REEN, réglementations européenne Data Act et Data Gouvernance Act.

Le premier critère que je préconise pour évaluer le poids du numérique est donc l’Evolution du nombre d’objets connectés.

Sur les 20 dernières années : la digitalisation de notre quotidien

Les équipements qui sont entre nos mains aujourd’hui facilitent l’accès à certains univers : divertissement, médias, culture, communication, e-commerce …

Ce que je veux mettre en avant, au travers de ces exemples, c’est le rapport au temps. La multitude d’applications disponibles nous immerge de plus en plus dans nos appareils et nous y passons un temps considérable : que ce soit de façon individuelle pour regarder un film ou en collectif lorsqu’on nous montre une vidéo en ligne pendant un moment convivial au restaurant … Là où les gens passaient du temps dans des lieux physiques ou sur des objets – livre, journal – non connectés nous remplaçons progressivement ce temps, par un temps connecté.

Le temps d’utilisation est d’ailleurs l’une des 2 sources de revenu majeure des acteurs du numérique – l’autre, ce sont les données mais on va y revenir. En conservant l’attention de l’utilisateur il est possible de lui proposer de nouveaux produits, services et de le fidéliser pour générer des revenus. Selon le dernier rapport State of Mobile, le temps moyen d’utilisation d’un smartphone s’élevait à 4h48 en 2021 – 3h36 pour la France. Au-delà de la valeur absolue, ce qu’il est intéressant d’observer c’est l’augmentation de cette valeur : + 30% en 2 ans.

En utilisant les outils digitaux à notre disposition, nous ancrons le numérique dans nos habitudes ce qui explique l’augmentation que nous observons. Si vous souhaitez comprendre ce mécanisme, je vous invite d’ailleurs à découvrir ce livre : Le pouvoir des habitudes. L’Evolution du temps d’utilisation de nos équipements est donc le 2ème critère que je vous propose pour évaluer le poids du numérique sur l’environnement.

Sur les 10 dernières années : la haute qualité et la haute disponibilité remplacent la sobriété

L’évolution du numérique et sa démocratisation sont étroitement liées aux réseaux de télécommunication sous-jacents. Lorsque j’utilisais une connexion 56K en 2000, la bande passante limitait fortement la quantité de données transmises et pour conserver des délais d’affichage raisonnables, les sites internet étaient très légers.

Des évolutions techniques majeures ont permis d’augmenter considérablement les débits disponibles. Les premières étapes – ADSL, 3G – ont permis d’améliorer les temps de réponses et de faire face à l’arrivée massive de nouveaux utilisateurs. Mais les évolutions suivantes – 4G, VDSL, FIBRE – ont principalement permis aux fournisseurs de services de proposer des contenus de plus en plus volumineux (photos, vidéos) en augmentant progressivement la résolution (HD : 921 600 pixels ; FULL HD : 2 073 600 pixels ; 4K : 8 847 360 pixels).

data soutenable: screen resolution

Le poids de nos vidéos et la quantité de données échangées a donc augmenté de 860% entre la résolution standard de 2013 et celle de 2023. Cette différence colossale est peut-être perceptible à l’écran – s’il est suffisamment grand – mais la puissance nécessaire est masquée par l’augmentation permanente de la capacité de nos appareils. On parle d’effet rebond

Et côté données et puissance de calcul, que se passe-t-il ?

Les spécialistes pourraient intervenir en précisant que les algorithmes de compression d’images et de vidéo permettent de limiter le volume nécessaire au stockage et au partage de ces vidéos. C’est vrai ! Mais la contrepartie de cette solution est la puissance de calcul et l’énergie nécessaire pour décompresser ces vidéos, sur chacun des écrans où elle sera visionnée. Autres chiffres intéressants à observer et qui fait le lien avec le 2ème critère de notre évaluation : le temps d’utilisation de nos équipements. Les cadrans ci-dessous mettent en avant le volume de données générées en 1 minute sur Internet.

data soutenable 2016
data soutenable - data 2021

En comparant les situations des 2016 et 2021, on peut noter là encore une croissance importante de certains usages : Facebook avec + 100% ; Snapshat avec + 544% ou encore Instagram avec + 1700%. En considérant sur cette même période la différence de taille pour une photo ou une vidéo, on voit que l’augmentation du volume de données est impressionnante.

Data soutenable 2023
Cela donne quoi en 2023

L’autre exemple intéressant à observer concerne les nouveaux usages. En prenant le cadran de 2023 on voit des applications qui n’étaient pas mises en avant précédemment même si elles existaient déjà. Mais leur utilisation aujourd’hui n’a plus rien à voir avec ce qui se faisait il y a 5 ans.

La messagerie instantanée existait précédemment mais l’éclatement géographique des équipes avec le télétravail a induit une utilisation massive de ces applications avec de surcroît la généralisation de la visioconférence. Cette nouvelle façon d’échanger entre collègue nécessite des flux vidéo conséquents notamment lorsqu’on observe les 6,3 millions de meeting Zoom en simultané mentionnés ici.

Et l’utilisation de l’IA dans tout ça ?

L’utilisation de l’intelligence artificielle à grande échelle fait également son apparition dans ce nouveau cadran. Là ou l’IA existait déjà au travers des applications ou processus qu’on utilisait, l’arrivée de l’Intelligence Artificielle Conversationnelle a généré un flux d’activité sans précédent l’infographie ci-contre le démontre. Ce type d’algorithme nécessite énormément de données pour être entrainée et la guerre des chiffres sur le nombre de données utilisées pour l’entrainement de ces IA le démontre. Mais ce n’est pas tout. Pour fonctionner, l’Intelligence Artificielle a également besoin d’une grande puissance de calcul ce qui correspond à d’autant plus de ressources nécessaires à leur fonctionnement.

utilisation data soutenable 2023

Ces données virtuelles qui reposent sur des équipements réels

Au travers de ces exemples on peut voir que notre consommation du numérique a une influence directe sur la quantité de données stockées ou sur la puissance de calcul que chaque équipement doit proposer. L’objet que vous avez entre les mains : ordinateur, smartphone, tablettes, … n’est qu’un maillon de la chaine. 
Quand vous visualisez une vidéo, celle-ci a été hébergée dans différents Data Center ce qui permet à de nombreux utilisateurs de la regarder en simultané. Cette vidéo a ensuite été relayée sur différents équipements qui constituent les réseaux de télécommunication avant d’arriver chez vous. En véhiculant de plus en plus de données, tous ces équipements doivent fournir de plus en plus de puissance pour assurer la qualité du service final. L’Evolution de nos usages est donc le 3ème critère que je vous propose pour évaluer le poids du numérique sur l’environnement car il englobe la quantité de donnée et la puissance de calcul.

Assemblons ces différents éléments de notre évaluation

Le secteur du numérique exploite des ressources tout au long de sa vie : production de matériel, fonctionnement des data center et des réseaux de télécommunication, utilisation au quotidien. Chaque équipement fabriqué et chaque connexion exploitée a un impact sur l’environnement : génération de gaz à effet de serre, consommation d’eau, … 

La croissance continue des usages peut donc s’évaluer selon 3 critères qui viennent se multiplier :

  • L’Evolution du nombre d’objets connectés lié au nombre d’utilisateurs mais aussi au nombre d’équipements que chacun détient. Même sur l’évaluation de 25 milliards d’objets connectés supplémentaires dans les 10 prochaines années peut être challengé, les 2 milliards d’utilisateurs supplémentaires sur les 10 années écoulées le sera moins.
  • L’Evolution du temps d’utilisation avec une bataille entre acteurs du numérique pour grapiller toujours un peu plus de notre temps en proposant de nouveaux services digitaux ou en utilisant nos biais pour intégrer des solutions numériques dans nos habitudes. Avec une augmentation de 30% du temps d’utilisation des Smartphone sur les 2 dernières années, on voit que ces acteurs progressent bien.
  • L’Evolution de nos usages qui est étroitement liée à la puissance de calcul, aux réseaux déployés et à la quantité de données générées. Avec l’arrivée d’applications et de fonctionnalités de plus en plus consommatrices de ressources ce 3ème facteur a donc une influence  

On peut donc évaluer ici, sans mesure précise, que si les tendances restent les mêmes et si aucune action proactive n’est menée pour limiter la consommation de ressources, alors le numérique aura un impact de plus en plus important sur l’environnement et à grande échelle.

Que pouvons nous faire de ces constats ?

Les initiatives se poursuivent pour que les mesures de l’impact du numérique sur l’environnement soient de plus en plus précises. Comme indiqué en introduction, ces mesures sont essentielles pour améliorer nos pratiques. Mais il n’est pas nécessaire d’attendre de nouveaux indicateurs pour faire évoluer nos habitudes. En reprenant les 3 critères évoqués précédemment il est possible d’identifier rapidement des leviers d’actions :

  • Le volume de données générées et utilisées par les différentes systèmes peut être allégée. Une démarche basée sur une meilleure sélection des cas d’usages, la réduction des flux et la sélection de données pertinentes permettent d’abaisser drastiquement la puissance de calcul nécessaire.
  • L’optimisation des traitements, la rationalisation des architectures ou la limitation de la redondance des données sont des leviers techniques importants dans l’amélioration des pratiques.

Ces leviers combinés permettent de réduire les besoins en équipements ou d’allonger leur durée de vie au niveau des organisations. D’autres axes d’amélioration sont possibles et nous vous proposerons de les découvrir dans notre guide pratiques.

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