Agile Tour Paris 2011 – Leadership des talents
Cette présentation explique la similarité forte de nos projets agiles avec d’autres corps de métier dont celle du sport. Elle montre les moyens efficaces d’organisations d’équipe de projets informatiques. Puis elle donne les solutions offertes par Scrum et les indicateurs de pilotage physiologiques qui seront indispensables aux équipes pour leur permettre de réguler les facteurs de stress physiques, émotionnels et mentaux au quotidien, de limiter les risques psychosociaux et d’optimiser les interactions des personnes entre elles et avec leur environnement.
Le besoin d’adaptation
Les objectifs de cette session sont multiples, et avant tout centrés sur l’humain :
- Augmenter la qualité des interactions et accélérer les processus de construction d’équipe
- Réduire la pression individuellement et de groupe par des techniques simples et scientifiques qui ont fait leur preuve dans le sport olympique
- Vivre le changement
- Faire face aux agressions et aux bruits cognitifs
- Développer la connaissance de soi et la confiance
La session débute sur une rapide présentation des trois orateurs. Patrice Petit (Agilebee, agilii.com) est Certified Scrum Trainer et fondateur de l’Agile Tour. Philippe Houssin est devenu coach Individuel et collectif, après avoir vécu un Burn Out en 2003. Ralph Hippolyte est quant à lui Professeur à l’Insep – Coach haut niveau d’athlètes, d’entraîneurs et d’équipes olympiques et professionnelles. Maintenant que les présentations sont faites, on va pouvoir entrer dans le vif du sujet . Patrice Petit nous expose les problématiques d’aujourd’hui liées au facteur humain essentiellement : Comment faire face aux besoins d’adaptation nous incitant à plus d’efficacité et de performance ? Quels sont nos limites et les risques ? Comment soigner les problèmes physiologiques rencontrés ? Comment manager les talents ? Le concept est clair : plutôt que de réinventer la roue en testant de nouvelles méthodes de management, il vaut mieux apprendre de ceux qui ont déjà la maitrise de ces sujets : Les coachs sportifs de haut niveau.
Scrum et le sport de Haut Niveau
Les trois speakers présentent 5 problématiques avancées à résoudre
Accélération de l’innovation
Première problématique, l’impact de l’accélération de l’innovation. L’innovation, est un besoin vital pour la société, mais cela amène une complexité croissante nécessitant d’autant plus d’adaptation. L’informatique est en effet le premier métier impliqué par cette problématique. Patrice nous explique que Scrum répond à ce besoin par une approche empirique. Vient ensuite un petit rappel sur les principes de la méthode Scrum. Ce qui est déjà plus original, ce sont les interventions de Ralph qui fait des analogies très intéressantes avec le sport en équipe de haut niveau. Outre le nom emprunté au monde du ballon ovale, la méthode Scrum possède des similarités avec le sport, à commencer par l’auto-organisation. Dans les deux domaines, pour atteindre un niveau de performance optimum, l’équipe doit être auto-organisée, pour permettre à chacun de s’exprimer selon ses besoins. Il est ainsi essentiel de donner aux personnes la possibilité de s’exprimer sur leurs points forts. Ralph nous parle de leadership de potentialisation, permettant de faire émerger le potentiel de chacun.
Comment s’adapter, et survivre aux changements fréquents ?
Changer de techno, de métier, évoluer hiérarchiquement… c’est assez plaisant en début de carrière. Mais ceci comporte des risques, comme la suradaptation, la procrastination, le burn out, ou le célèbre principe de Peter qui dit que « tout employé tend à s’élever à son niveau d’incompétence ».
Faire du sport après 35 ans ? Quelle évolution de carrière ?
« Le sport, ça transforme ! ».
Il faut savoir s’adapter et utiliser ce que l’on a appris. En sport, on devient éventuellement coach, entraineur, manager, préparateur physique / mental, profiler. On peut également changer de sport. En informatique, on peut devenir également coach d’entreprise.
Comment être performant sans se blesser ?
Règle d’or du sportif, il faut avant tout rechercher l’efficacité, mais sous pression, et surtout dans la limite du stress. 4 états mentaux de référence sont cités :
- Relâchement : lorsque l’on est détendu, ou au repos
- Activation : lorsque l’on est concentré, en effectuant des tâches prioritaires, pendant un effort physique / cognitif.
- Ennui
- Anxiété
Le stress est une combinaison de l’état d’activation et de l’état d’anxiété. Pour être performant sans se blesser, Il faut travailler l’efficacité maximale !
Comment surmonter les obstacles ?
Tout au long d’un projet, divers obstacles apparaissent, tout le monde le sait. Démotivation, problèmes personnels, fatigue, veille techno sont autant d’obstacles variés qu’il faut savoir appréhender et surmonter. Patrice et Ralph nous montrent un exemple de solution face à certains obstacles : l’équipe de récupération. Dans le cadre d’un « Scrum of Scrum », on détache régulièrement une personne de chaque équipe pour composer une équipe spéciale de récupération pour les personnes ayant besoin de ralentir ou de faire autre chose en plus du projet. Celle-ci va travailler sur des tâches plus simples et moins prioritaires, sans obligation de résultat, contrairement aux équipes principales. Comme en sport ! Il est essentiel de ralentir le rythme et d’avoir un sommeil suffisant et de qualité pour assurer la régénération des neurones et l’assimilation de l’apprentissage.
Scrum répond à ce besoin d’adaptation avec une approche empirique, le travail en équipe, la cohésion de groupe. La capacité à surmonter les obstacles amène un gain d’efficacité et donc de la productivité, pour arriver à une entreprise performante. Le besoin d’adaptation amène naturellement à la notion d’efficacité !
Fun et excellence
La session se poursuit sur le thème de l’efficacité, avec la recherche de l’excellence, et comment manager efficacement les talents.
Anticipation
Ralph nous expose un point important en sport et en entreprise, l’anticipation. Il la définit comme la vitesse de détection d’un signal faible. En tennis par exemple, il faut savoir anticiper la trajectoire d’une balle dépassant souvent les 180Km/h. L’anticipation, ce n’est pas seulement valable en sport, mais également en entreprise. Patrice nous relate quelques faits intéressants à propos de General Electric. C’est la seule entreprise fondatrice du Dow Jones et actuellement encore dans le top 10 des entreprises américaines, et son nom de domain ge.com a été déposé en… 1986 ! Soit A l’aube d’internet. Ceci démontre une certaine capacité d’anticipation qui permet à cette entreprise très ancienne de rester encore très compétitive.
Conseils utiles d’un coach sportif
Les émotions sont contagieuses.
Dans le sport comme dans un projet, il est essentiel de se concentrer sur la personne de l’équipe qui ne va pas bien et qui risque de menacer la cohésion du groupe, ou de niveler par le bas les performances globales de l’équipe. Une personne ne jouant pas le jeu (dans tous les sens du terme !) ou dégageant des idées noires peut influer sur le moral de l’équipe. Il est donc primordial de gérer ce genre de personne. Ralph nous explique qu’une personne en forme aura un ratio de 6 pensées positives pour une pensée négative, tandis qu’une personne en dépression verra son ratio tomber à 1 pensée positive pour 2 pensées négatives…
Le corps intègre beaucoup plus de choses qu’on ne le pense.
La session se poursuit sur le thème du lien entre le corps et le cerveau. Après quelques explications sur notre “sens de marche”, Ralph nous fait une démonstration simple et efficace. Il nous demande de nous lever et de visualiser la répartition avant/arrière de notre poids sur nos pieds. Checked. Ensuite, on lit à voix haute les 2 slides de mots suivants :
1. OUI, NON, OUI, OUI, OUI.
2. NON, OUI, NON, NON, NON.
Challenge Accepted. Il nous fait ensuite remarquer que notre corps oscille entre ces deux séries de mots. Si notre poids est naturellement plutôt sur l’avant des pieds, alors dans le cas 1, on sera plutôt vers l’avant, et dans le cas 2, notre corps ira légèrement en arrière. Cela s’est vérifié pour moi ainsi que pas mal de monde présent dans la salle. Intéressant !
Il est très important de parler la langue de l’autre.
Un groupe a un profil, bien que chacun s’exprime différemment dans ce groupe. Pour avoir un groupe performant, il est indispensable que la communication au sein du groupe soit fluide et naturelle. C’est pourquoi Ralph nous parle de “parler la langue de l’autre”, en d’autres termes, être compréhensif et compréhensible pour assurer une communication optimale.
Expression et récupération
La zone d’expression est la zone dans laquelle on est très performant, on maitrise son sujet, on avance vite et bien, avec un minimum de fatigue. Dans la zone d’adaptation en revanche, on n’est pas dans notre milieu, on ne maitrise pas et on se fatigue plus vite. Ralph nous en fait une démonstration simple et pertinente. Ecrivez de votre main usuelle vos noms, prénoms et la date du jour. Facile. C’est la zone d’expression. Ecrivez ensuite ces mêmes informations de l’autre main. A moins d’être ambidextre, c’est déjà nettement plus dur. C’est la zone d’adaptation. L’idéal est d’être à 80% dans sa zone d’expression, et 20% dans sa zone d’adaptation / récupération.
La période de recyclage après une performance est très importante. Il faut en effet remotiver l’équipe tout en lui faisant récupérer des forces. Ralph cite l’exemple du joueur de Tennis qui, après avoir gagné un tournoi du Grand Chelem, doit rester motiver pour continuer sur sa performance.
4 compétences d’actions: DGRC
La session s’oriente vers des notions de management et de psychologie plus poussées. Patrice nous parle d’un outil individuel et de groupe de management définissant 4 compétences d’actions reflétant différentes personnalités.
- Dextérité. Ce sont les « pratiques ». Ils ont besoin d’avancer.
- Globalité. Ce sont les « relationnels ». Il ont besoin d’être considéré.
- Rythme. Ce sont les « idéalistes ». Ils ont besoin de relativiser.
- Comprendre. Ce sont les « rationnels ». Ils ont besoin de comprendre.
Le but de cet outil est de détecter les profils dans une équipe, comprendre la dynamique de fonctionnement des individus, pour enfin faire travailler ces 4 profils ensemble. L’objectif visé étant d’anticiper, réguler, et finalement mieux vivre au sein de l’équipe et de l’entreprise. Ces 4 profils permettent de définir les leviers les plus puissants pour la performance,
Ce schéma représente deux styles de management assez différents, que l’on pourrait résumer en old-school VS Next-Gen, ou management classique VS management agile.
Les talents innés et à développer
Comment gérer les talents ? Il faut tout d’abord se connaître, utiliser ses forces et développer ses forces cachées. Deux domaines sont évoqués en parallèle :
- La dette d’énergie : Connaître nos talents amène des axes d’amélioration et d’orientation, qui vont enrichir ceux-ci.
- La dette technique : Connaître l’architecture, accéder aux parties obscures du code d’un projet par exemple, mène à une amélioration continue et une vue d’ensemble du projet, qui vont permettre de faire évoluer cette architecture.
Finalement, l’excellence se résume en deux points : s’appuyer sur ses talents, et rester performant dans sa zone de récupération.
Self-Coaching et mesure physiologique
La dernière partie traite du self-coaching, et des indicateurs physiologiques.
Soyez performant !
En sport, la performance est vitale, tandis qu’elle n’est pas forcément un but à atteindre en informatique. En revanche dans les deux domaines, on parle d’efficacité optimale. Le point commun ? Le fun !
Croiser nos connaissances en Scrum avec les techniques du sport peut apporter énormément à l’équipe. Un très bon slide nous résume le rapport entre le niveau de performance et le niveau d’activation. La routine correspond à un niveau faible de performance et d’activation, tandis que l’inconfort correspond à un niveau élevé. La zone optimum correspond à un niveau d’activation faible à moyennement élevé, pour un niveau de performance faible à élevé. Petit rappel, la zone d’inconfort ne doit représenter pas plus de 20% de notre temps, pour 80% de zone d’expression.
Gardez votre self control !
Une nouvelle démo nous est proposée par Philippe qui choisit une personne sur l’index de laquelle on fixe un capteur cardio-fréquencemètre. Le logiciel de capture nous montre alors en temps réel le rythme cardiaque de celle-ci, ainsi que sa variabilité cardiaque. La variabilité cardiaque, c’est « la boite noire du sportif ». Cela mesure l’écart de temps entre deux pulsations, et représente donc la régularité du pouls , bien plus révélatrice que la fréquence cardiaque. Puis, Philippe lui demande de faire des calculs mentaux, avec une difficulté croissante. On voit alors très clairement le rythme cardiaque augmenter avec le stress. Dernière phase de l’expérience, Philippe demande à la personne de respirer profondément, en fermant les yeux, pendant quelques secondes. Le rythme cardiaque redescend alors à son niveau initial.
Ceci démontre une fois de plus que bien que nous travaillons dans un milieu purement cognitif, notre corps, tout comme celui des sportifs de haut niveau, peut être soumis à un stress comme pour un effort physique. Il est donc important de surveiller son corps et d’avoir une hygiène de vie saine.
Conclusion
La session se termine en donnant des pistes et moyens pour imaginer les nouvelles équipes d’informatique de demain : Avoir une équipe sous contrôle physiologique dans leur seuil d’efficacité optimale, pour des projets réalisés dans un temps très court avec un maximum de valeur, avec le soutien de coachs mentaux comme physiques et d’un manager. Patrice, Philippe et Ralph concluent cette présentation en parlant de la démarche Action|Types. Cela vise à améliorer notre environnement de travail en combinant les trois dimensions fondamentales de l’individu : son corps, ses émotions et son mental.
Pour ma part, j’ai vraiment aimé cette session, de part la qualité de ses speakeurs (mention spéciale à Ralph Hippolyte), et de part l’approche psychologique faite par rapport aux problématiques de performances et d’innovation. Après avoir appris à mettre en place Scrum dans une équipe, appréhender la transition globale de l’entreprise vers l’agilité, la troisième étape sera la gestion des risques psychosociaux, ou plus généralement savoir replacer au centre de l’équation agile l’individu en gérant le coté humain. L’agile de demain ? Je pense que ceci sera effectivement une étape clé pour garder des process agiles efficaces et optimiser nos environnements de travail. La route est certes encore longue, mais le chemin envisagé par cette présentation, s’inspirer des coachs sportifs, est vraiment très bien vu.